J’écris cet article pour répondre au billet de Pierre-Luc Lafrance. En résumé, Pierre-Luc demande à la communauté de blogueurs de la SFFQ comment nous avons commencé à bloguer, quels sont les blogues que nous lisions au départ, quand avons-nous rencontré les gens que nous lisions en personne pour la première fois, et quels ont été les impacts sur notre écriture.
Déjà plusieurs auteurs se sont prêtés à l’exercice, dont Geneviève Blouin et Isabelle Lauzon.
J’y vais donc avec mes réponses.
Comment j’ai découvert les blogues?
Ouf.
Ça date de longtemps.
Ça a dû commencer quelque part en 2001. À cette époque, je travaillais de nuit dans une usine. La fin de semaine, alors que mes amis rentraient chez eux à 1 ou 2 heures du matin, j’avais encore 6 heures à tuer devant moi si je voulais me coucher à une heure normale. Et on s’entend qu’à Saint-Odilon-de-Cranbourne, le night life, c’est assez mort.
Internet pouvait donc me divertir un peu.
Branché sur le « dial-up », j’apprenais à coder en HTML. Je m’étais créé un site pour mon clan de StarCraft, de même qu’un site Web pour une série de romans sur laquelle je travaillais. J’y mettais des dessins, des textes qui expliquaient en quoi consistait l’univers. Il y avait aussi une section « Nouvelles » (parce que les mots blogue ou weblogs étaient pas encore en vogue) où je parlais de l’évolution du projet.
J’ignore si vous le savez, mais en 2001, il n’y avait pas de systèmes de gestion du contenu comme WordPress et Blogger (ou bien ils n’étaient pas assez populaires pour que je les connaissent… ce qui était cool, apparemment, c’était LiveJournal). Je faisais tout en HTML, ce qui signifiait que si ma page de nouvelles affichait 6 billets et que je voulais en ajouter un nouveau, je devais effacer le dernier et en réécrire un autre en copiant-collant le code.
C’était laborieux. Et le désavantage principal : j’ai tout perdu ces textes, puisque je ne faisais aucune copie de sauvegarde.
Pas longtemps après, je découvre HorreurQC, un site géré par Guillaume Houle (Jonathan, étais-tu dans l’organisation aussi?) On parlait d’horreur, évidemment, et on publiait des nouvelles en ligne. On défrichait pas mal dans le domaine de la lecture numérique. Par exemple, j’avais programmé, pour le site, un système qui permettait de grossir la police de caractère des nouvelles et de changer les marges, pour faciliter la lecture sur un écran (mais l’écriture était blanche sur fond noir, donc c’était encore loin d’être parfait).
Par le biais du forum d’HorreurQC, j’ai découvert les sites de Pierre-Luc Lafrance, de Claude Bolduc, d’Alexandre Lemieux, entre autres. Certains contenaient des blogues, mais pas tous. Plusieurs étaient conçus avec Front Page ou des logiciels similaires. Du point de vue d’aujourd’hui, ça faisait dur, mais c’est comme ça qu’on procédait à l’époque.
HorreurQC m’a tranquillement mené vers le milieu de la SFFQ, notamment par son forum, où plusieurs acteurs communiquaient régulièrement. Je me suis ensuite abonné à la liste de diffusion de Boréal, où les échanges n’étaient pas toujours roses!
À quel moment ai-je commencé à bloguer?
Même si je tenais des pages de « Nouvelles » dans mes sites officiels, j’ai commencé à bloguer plus sérieusement avec WordPress en 2007. Je ne sais pas pourquoi, mais c’étaient les blogues de Stéphane Dompierre et de Matthieu Simard qui m’ont convaincu de me lancer là-dedans. Ils écrivaient régulièrement et avaient de bonnes rétroactions de la part du public. Je voulais participer au buzz.
Ma mémoire n’étant pas particulièrement fiable, je peine à me souvenir qui je lisais à cette époque. Si je me fie à mon tout premier billet, je lisais Mère indigne et Un taxi la nuit, deux blogues qui sont aujourd’hui publiés en livres. Je pense que les acteurs de la SFFQ sont davantage rentrés en force autour de 2009.
À quel moment suis-je passé du virtuel au réel?
En 2005, lors de mon premier Boréal. Fait cocasse : je participais à une table ronde et je n’avais aucun livre publié! Une chance qu’Élisabeth Vonarburg était assise à côté de moi. Elle m’a vraiment donné un bon coup de pouce pour que je puisse me sentir à l’aise durant tout l’exercice. À cette époque, il y avait très peu d’auteurs de la « nouvelle génération » dans la salle; personne ne me connaissait, et je ne connaissais personne. C’était un des moments les plus gênants de mon existence.
J’ai du moins réussi à serrer la main à plusieurs personnes qui participaient à la liste de diffusion de Boréal.
C’est ensuite que j’ai fait publier Alégracia et le Serpent d’Argent aux Six Brumes. À partir de ce moment, c’est dans les salons du livre que j’ai pu rencontrer, un par un, les différents acteurs de la SFFQ, jeunes et moins jeunes.
Quels ont été les impacts?
C’est difficile à dire (encore). Ayant commencé à avoir une identité virtuelle à peu près au même moment que j’ai commencé à écrire, les deux domaines (littéraire et virtuel) ont toujours cohabité chez moi. C’est certain que sans HorreurQC, je n’aurais peut-être jamais rencontré les gens des Six Brumes et je n’aurais peut-être pas publié mon premier roman là-bas. Que se serait-il passé, sinon? On ne le saura jamais! Les éditeurs qui s’intéressaient à la fantasy n’étaient pas légion en 2002 et 2003. Le boum est venu par la suite. J’aurais donc probablement dû attendre 2 ou 3 ans avant de publier Alégracia, en considérant bien sûr que le projet aurait trouvé preneur.
C’est par le biais du forum d’HorreurQC, et de la liste de diffusion de Boréal, que je me suis amené pour la première fois au congrès Boréal. Depuis 2005, j’y vais chaque année. Et en fréquentant les salons du livre pendant quelques années, mon réseau de contacts s’est progressivement élargi.
On peut donc dire que le virtuel a été une magnifique porte d’entrée vers le milieu. Sans Internet, je ne suis pas certain que j’aurais réussi à rejoindre quiconque à partir de ma Beauce profonde. Je découperais peut-être encore des cochons, à l’heure qu’il est.
Donc, merci, Internet.