Cette semaine, je me suis rendu chez le garagiste pour faire poser mes pneus d’hiver.
Ne dit-on pas de ces objets qu’ils sont le « contact entre la voiture et la route », d’où leur immense importance?
Eh bien, j’ai eu un raisonnement similaire par rapport à l’outil que j’utilise depuis quelques années pour écrire : mon clavier cheap, de marque Dell. Celui qui est venu avec mon ordinateur neuf. Clavier pas ergonomique pour deux cennes, drabe et dont les ressorts des touches sont rendus aussi durs que des suspensions de bagnole des années 70.
Ayant eu mal au poignet pour la énième fois en écrivant, je me suis écrié : « Ah! ben, morbleu! J’en ai assez arraché avec cette camelote! Amenez-moi ma monture; je m’en vais m’acheter un clavier neuf! »
Direction : Bureau en gros.
Après une heure de niaisage dans les allées, ponctuée de : « Ah! lui, peut-être. Non. Je sais pas. Hmm… Trop cher. Trop gros. Trop blanc. Arg. Peut-être celui-ci? Celui-là? » (vous n’auriez pas aimé être avec moi), j’ai fini par choisir ce modèle, fort douillet pour les doigts et leurs muscles sous-jacents :
Fait particulier : depuis que je l’utilise, on dirait que je fais moins de fautes de frappe. (et évidemment, parce que j’ai mentionné ce fait, je vais subir les foudres de la loi de Muphry)
J’ai aussi réalisé que les bras de ma chaise d’ordinateur me gênaient lorsque je voulais atteindre ma souris. Dans mon excès de furie, je les ai arrachés.
Ça devrait améliorer mon humeur pour au moins une semaine.
Tellement important un clavier… Peux-tu croire qu’au bureau (où on s’attend pourtant que je tape à minimum 50 mots/minute toute la journée) j’avais juste un clavier hyper cheap?
Jusqu’au jour où je me suis écoeurée et où j’ai gueulé assez fort pour obtenir enfin un clavier ergonomique. Ils ont pas perdu au change : j’ai plus mal aux mains et je tape à 55 mots/minute!
Sérieusement, je ne sais pas pourquoi j’ai attendu si longtemps. J’avais mis mon ancien clavier ergonomique au rancart quand les touches étaient devenues trop dures (pour ensuite utiliser celui de Dell ci-mentionné).
Avant de procéder à l’achat, j’ai été chercher mon ancien clavier dans la chambre de cèdre. Il allait… assez bien, jusqu’au moment où j’ai enfoncé la touche « backspace ». Le bouton est resté collé.
Ouache.
Bref, j’étais dû pour un neuf.
LOL! La passe du « backspace » collé, elle est pas mal bonne… Le bon dieu t’a envoyé un gros message pour que tu te gâtes enfin un peu avec un nouveau clavier!!! Quoique ce n’est même pas une gâterie, c’est juste un outil de travail nécessaire au fond. Des fois, on est cheap à des places où on ne le devrait pas! :D
Le principe du cordonnier mal chaussé.
Ça reste quand mëme mineur comme problème. À part la touche qui reste collée, je veux dire. Quand j’ai commencé à écrire, les ordinateurs n’étaient encore que des jouets hors de prix et j’utilisais une machine à écrire mécanique, une Remington verte qui pesait bien ses 15 kilos et qui datait du milieu des années 1950. Les plus fortunés utilisaient des machines à écrire électriques (les IBM à boule, ça vous dit quelque chose?) très coûteuses et relativement fragiles. Mais c’étaient les seules qui suivaient le rythme quand on tapait vraiment vite.
Sur une machine à écrire mécanique, il fallait appliquer une pression sûrement trois à quatre fois supérieure à ce qu’exigent les touches d’un clavier bon marché d’ordinateur. De plus, la touche s’enfonçait de deux à trois cm au moins. Par ailleurs, ces machines perdaient un peu de leur rigidité à l’usage. Les touches répondaient moins bien, les marteaux commençaient à se coincer l’un sur l’autre quand on écrivait trop vite (il fallait les dégager à la main) et les espaces entre les lettres et les lignes devenaient de plus en plus irrégulier. Il était alors temps de rapporter la machine chez le réparateur pour qu’il la réajuste et la lubrifie.
Ce que je raconte ne date pas de la préhistoire. Je me souviens que nous étions une douzaine de participants à l’atelier d’écriture d’Élisabeth Vonarburg en 1985. Sur le groupe, un seul (Claude J. Pelletier, qui a toujours aimé la technique) avait un ordinateur, un Apple IIc «compact» (pour l’époque) qui était une sorte d’ancêtre du Mac Classique. Élisabeth avait une machine électronique à mémoire, vraiment une merveille pour l’époque, avec matrice d’impression à marguerite; mais la machine ne suivait pas le rythme quand Élisabeth était vraiment lancée; elle devait le temps en temps s’arrêter, le temps que la machine vide la mémoire tampon en imprimant le texte en attente. Tous les autres avaient des machines mécaniques et dans la salle de l’atelier, on n’entendait que le «tacatac» des marteaux sur le papier et les «dings» nous rappelant qu’il fallait tirer sur le levier de retour de charriot…
Alors, avec le recul, les claviers bon marché ne me dérangent donc pas trop. Et je n’aurais pas voulu être à la place de Flaubert ou de Hugo qui, eux, n’avaient que des plumes d’oie pour s’exprimer! Vous vous imaginez remettre votre quatrième réécriture au propre À LA MAIN? De quoi devenir fou!
Oh que non! Je ne m’imagine pas taper à la machine.
Si je peux paraître chialeux, en fait, c’est parce que je traine une tendinite depuis mes brèves mais désagréables expériences en usine, et que je prends les précautions nécessaires pour ne pas faire ressurgir la douleur. Quand c’est pour la santé, les dollars sont toujours bien investis.
Et je ne m’imagine pas retourner à la machine à écrire non plus. Il y a certaines choses dont je suis nostalgique, mais pas des vieilles «piocheuses», absolument pas.
Évidemment, si t’as tendance à la tendinite (belle allitération, non?) je te comprends de faire particulièrement attention au choix du clavier, ça se justifie entièrement. Pour ma part, j’avais un clavier «ergonomique» (courbé, à tout le moins) au travail et je n’ai pas tellement aimé. Le doigté était différent (même à deux doigts) à cause des touches de largeur variable et j’ai toujours eu l’impression de commettre plus de fautes de frappes.
Remarque, ma position de travail est étrange elle aussi. Je m’assieds aussi bas que possible et je pose mon clavier sur le bureau et pas sur une petite tablette surbaissée. Il est donc très haut par rapport à moi. J’ai les avants-bras légèrement repliés vers le haut, mais les poignets sont droits, ce qui protège le canal carpien, je pense. Cette position me force aussi à garder le dos très droit – en position ergonomique normale, j’ai toujours l’impression d’être penché, que ça me tire dans le dos.
Ça fait 20 ans que mes amis me disent que ma position n’est pas ergonomique, mais les faits sont là: ils ont tous mal au dos et pas moi.
En définitive, l’ergonomie, c’est ce qui est confortable pour toi; pas ce que l’industrie a défini comme devant être confortable pour tous.